Les tensions économiques qui perdurent post Covid imposent aux responsables formation de maîtriser quelques compétences financières qui leur permettront d’optimiser leurs investissements en formation et d’en démontrer la rentabilité. Rapide tour d’horizon sur quelques compétences financières à développer (même si les budgets formation semblent encore relativement épargnés).
Convaincre encore et toujours une direction parfois dubitative sur le bien-fondé des investissements en formation
Les responsables de la formation jouent potentiellement un rôle crucial dans le développement des compétences des employés et, par conséquent, dans la compétitivité globale de l'entreprise. Cela dit, ils ne doivent pas mesurer leur effort pour en convaincre encore et toujours une direction de l’entreprise « terre à terre » qui s’interroge parfois sur le bien-fondé et la rentabilité des investissements (immatériels ou non) en formation. Cet effort suppose une compréhension solide des concepts financiers, car il s’agit, pour les responsables formation, de se placer au niveau de préoccupation des dirigeants de l’entreprise.
Justifier intelligemment les dépenses de formation
Maîtriser les compétences financières permet aux responsables formation de justifier les dépenses en présentant des analyses coût-bénéfice convaincantes. Must (et non plus seulement « nice to do ») : démontrer tangiblement que les ressources investies ajoutent de la valeur à l'entreprise. Encore faut-il que les responsables formation s’interrogent sur ce que les diverses parties prenantes (direction, métiers, collaborateurs, voire partenaires) entendent par « valeur ». Chercher aussi bien du côté d’une valeur facile à « monétiser » (par exemple : performance commerciale, satisfaction des clients, productivité de la R&D, etc.) que d'une gestion des talents plus efficiente (attirer, fidéliser).
Mieux gérer les budgets formation
Une bonne compréhension des finances permet aux responsables formation de mieux gérer les budgets alloués : identification des programmes les plus rentables et minimisation des gaspillages. Pouvoir répondre à un commanditaire, aussi haut placé soit-il, que sa demande doit passer après un programme de formation dont la rentabilité est nettement supérieure pour l’entreprise ? Pourquoi pas ! Même si la force des choses impose qu'on doive parfois y renoncer … Quant à la minimisation du gaspillage, elle est induite par l'inventaire et la connaissance du patrimoine (les actifs) des contenus déjà produits dans l’entreprise, ainsi que par la capacité des services formation à réutiliser les actifs existants, voire à mutualiser les programmes à créer (confère la démarche de Michelin).
Crédibilité et influence du responsable formation
Il y va donc, également, de la crédibilité et de l’influence que les responsables formation sauront conquérir au sein de l'organisation par un meilleur alignement de leurs initiatives avec les objectifs financiers de l'entreprise. Certains ont imaginé (à juste titre, pensons-nous) que la direction formation pourrait être naturellement représentée au comité de direction… Cet avenir est conditionné par sa capacité (il faut y insister) à se hisser au niveau de préoccupation des autres directions ; préoccupation dont la teneur financière n’est jamais absente.
Savoir lire et analyser les états financiers
Plusieurs compétences financières sont essentielles à acquérir. D’abord, savoir lire et analyser les états financiers de l’entreprise tels que bilans, comptes de résultat et flux de trésorerie… ne serait-ce que pour évaluer quelle est la santé financière de l'entreprise, et comment elle évolue, et se préparer à la discussion budgétaire ! Rappelons (cela va sans dire) que la première compétence financière, c’est de savoir élaborer et conduire un budget formation privilégiant une utilisation optimale des ressources et du capital mis à disposition du service formation.
Coût-bénéfice et ROI
L'analyse coût-bénéfice est une autre compétence clé. Elle permet de comparer les coûts des programmes de formation aux bénéfices attendus. Enjeu : la prise de décisions éclairées sur les investissements à réaliser. Quant à mesurer la rentabilité (le retour sur investissement (ROI)) des programmes de formation, c'est indispensable pour démontrer qu'ils ont créé de la valeur, et donc pour justifier de leur financement.
Des outils financiers potentiellement utiles au service formation
Parmi les outils financiers couramment utilisés, certains sont particulièrement pertinents pour le service formation. Nous le disions : le bilan permet d'évaluer actifs et passifs de l'entreprise, pour comprendre sa capacité à investir dans des programmes de formation. Traitant des revenus et des dépenses, le compte de résultat permet d'évaluer l'impact financier des formations sur les bénéfices de l'entreprise. La compréhension des flux de trésorerie (entrées et sorties de liquidités) est cruciale pour planifier les investissements en formation et s'assurer qu'ils ne perturbent pas la trésorerie de l'entreprise. On notera que la connaissance de ces états permet également de connaître la solidité financière des fournisseurs avec lesquels la direction formation travaille déjà ou envisage de travailler (une diligence utile dans le cadre des appels d'offre).
Retour sur le ROI
Calculer le rendement d'un investissement en formation (ROI) implique plusieurs étapes. D’abord, identifier tous les coûts directs et indirects, fixes et variables, liés à la formation (frais de formation, pertes de productivité des personnes en formation…). Ensuite, évaluer les bénéfices (productivité accrue, réduction des erreurs, amélioration de la satisfaction des employés, réduction du turnover… La formule est connue : ROI (%) = (Bénéfices nets / Coûts totaux) x 100. Ce calcul est particulièrement pertinent dans les domaines où les résultats sont facilement quantifiables, comme les formations en vente, en production ou en compétences techniques spécifiques.
Des outils financiers opérant à deux niveaux
L'application de ces outils financiers doit se faire à plusieurs niveaux. À un niveau global, les utiliser pour l'ensemble du budget de formation permet d'assurer une gestion financière efficace et de démontrer la valeur ajoutée des activités de formation à l'échelle de l'entreprise. À un niveau plus spécifique, pour chaque projet de formation, une analyse financière détaillée permet de mesurer précisément son impact et d'ajuster les stratégies en fonction des résultats obtenus. Il s’agit, bien sûr, de s’assurer de la mise en cohérence des deux niveaux.
Est-ce le moment d’acquérir ces compétences ?
Une récente étude du Céreq montre qu’En France, les budgets de FPC ne faiblissent globalement pas : en 2022, la dépense nationale (FPC et l'apprentissage) a crû de 11,7 % à 31,8 milliards d'euros par rapport à 2021, après avoir fortement augmenté (33,6 %) de 2020 à 2021 (source : Céreq). Dans pareil contexte, on peut se demander s’il importe que les responsables formation développent leurs compétences financières… Réponse : oui ! En effet, pourquoi agir précipitamment sous la contrainte (lorsque l’urgence de ces compétences se fera sentir) si l’on peut s’y préparer par temps relativement calme ? Par ailleurs, une part croissante des budgets est consacrée aux technologies de formation en ligne, c'est-à-dire à des investissements (matériel, immatériel) dont la gestion financière diffère de l’exploitation des ressources habituelles de la formation (ressources humaines, salles, etc.). La demande de calcul du ROI n’est jamais très éloignée d’une demande d’engagement de ce type de dépense par le responsable formation.
|